AU COMPTOIR DES HISTOIRES

Ce que j’aime, c’est traîner dans les bars, commander deux trois coups à boire Conter aux copains mes histoires, mes moments de gloire et mes déboires J’aime leur faire croire que je suis malin. Que je suis loin d’être un bon à rien Que j’ai déjà fait un bout de chemin Mon coup à boire, je le mérite bien On aime parler de nos amours, moi qu’en ai pas beaucoup connu. Je leur dis ce que j’en pense de l’Amour, moi qu’en ai jamais vraiment reçu. Je leur dis comment c’était là-bas, quand j’ai fait la guerre au Viêtnam. J’étais pas né à cette époque-là, j’ai même jamais quitté Paname. Mais les copains, ils disent rien Mais ils savent bien que c’est des conneries. Mais veulent pas me filer du chagrin. Et c’est pour ça que c’est mes amis. Et nous, c’est ainsi qu’on voyage, qu’on sort la tête de ce foutu bar On en a vu des paysages sans jamais quitter notre comptoir. Mais moi, ce que j’aime pas, c’est la guerre, c’est la famine, c’est la misère On dit tout ça, oui, mais le pire, c’est que ça nous empêche pas de dormir. J’aime pas le fascisme et les fachos. Les nazis me sortent par les naseaux. C’est démago, certains diront. Puis votent la flamme aux élections. Pis les copains, ils disent comme ça « Ouais, t’as raison, mais t’emballe pas. » Mais je m’emballe pas, mais ça m’énerve. J’aime bien faire celui qui s’énerve. Ça fait genre, j’ai des opinions, que je me bats pour des convictions. Oui, mais dans le fond, je suis qu’un malin, je veux impressionner les copains. Je les emmène faire le tour du Monde, je leur raconte quand j’étais James Bond. J’invente les exploits de mon passé, des choses qui ne m’arriveront jamais. Et je me fais passer pour un autre. Comme ceux que je vois à la télé Quand j’ai failli être cosmonaute. Je trouvais que ça ne gagnait pas assez. Pis les copains, ben eux ce qu’ils aiment, c’est de faire croire qu’ils m’écoutent quand même Parce que dans le fond toutes mes histoires Me font sortir du désespoir. Pis les copains, ben eux ce qu’ils aiment, c’est de faire croire qu’ils m’écoutent quand même Parce que dans le fond toutes mes histoires, je dois bien être le seul à y croire !