La Chute du Soleil Loup

Bien avant que fut enfermée la lumière des Loups La cohabitation animale du pouvoir semblait obéir à Un équilibre ancestral du territoire Êtres de nuit, êtres de jour La répartition forcée d'un peuple dictant les règles de sa naissante sédentarisation L'humiliation n'attendait que la progéniture du Loup lorsqu'attirée par l'Homme Elle fut déformée pour produire la race canine Sa plus fidèle alliée de fortune Trié, sélectionné et croisé Le destin de la Bête fut bientôt scellé à mesure Que survenait par appauvrissement génétique La docilité de l'esclave et la force de travail de l'être dévoué Il ne manquait alors que la raréfaction de leurs vitales denrées pour que Chiens et Loups se retrouvent le coeur affamé à disputer le droit de subsister Donné au soleil, le Chien reçu les faveurs de la chaire grasse En échange d'une insidieuse mise sous tutelle de sa propre gamelle Cet enrôlement salarial façonna en lui une fierté dont Les vertus vantées encouragèrent son aliénante volonté de persévérer L'appât de la friandise confisqua la pensée de soi au profit du désir de l'autre Alors que leurs corps, déjà, se sclérosaient On poursuivit la professionnalisation des espèces En incitant la spécialisation des lignées On se méfia des croisements tout en formulant les rêves d'une pureté apprivoisée L'enclôt se fut frontière à surveiller et les jappements hymnes d'un territoire à sauver Contraint à la Lune, le Loup devint spectateur de sa propre exclusion tandis Que s'élevaient devant lui les barrières d'une société de labellisation Erigeant murs et citadelles, les bergers ancestraux imposèrent Par le fer, un abri sécuritaire pour leurs nouveaux cheptels Marqués des symboles du malin et de la terreur de l'incertain Loups et brebis gâleuses furent pourchassés Et expulsés par cette communauté pastorale Se refusant au devenir chien qui leur était proposé Ces créatures permirent à une indocilité engourdie de se réveiller Bientôt, celle-ci gagna l'âme de celles et ceux Que la société continuait de rendre aux forêts Enivré.e.s du poison de l'astre de la nuit, ces Hommes-Loups se firent bientôt les Chantres de la reconquête idéologique, arrachant le soleil à celles et ceux qui L'enfermèrent dans les esprits endormis de la bergerie Percevant l'odeur de cet humus révolutionnaire Le pouvoir rompit avec sa tradition d'exil comme punition En inventant la maitrise de l'opinion par incarcération Pourchassées, surveillées et contrôlées Les meutes firent preuve de ténacité en restaurant la soif de liberté qui Peu à peu, emplit les veines des travailleurs aveuglés Ce désir contamina l'air des peuples de Chiens qui Sous les coups de leurs régents Sentirent une grise toison naître sous le collier d'or Ou de chanvre hérité de leurs ainé.e.s Tandis que les maîtres se préoccupaient de réguler Les dogmes de leur pedigree Ceux-ci ne purent comprendre l'expression affamée de cette naissante férocité